« Nous prévoyons une croissance rapide en Espagne » – entretien avec Michael Strobaek, notre Global CIO

    Article publié dans l’Expansión le 26 novembre 2024.

    Selon Lombard Odier, la BCE abaissera les taux d’intérêt à 1,25%, voire davantage en cas de dégradation de la croissance économique supérieure aux prévisions.

    La stratégie d’investissement de Lombard Odier pour 2025 est axée sur les Etats-Unis et accorde une place centrale à l’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche. « Le monde va subir les contrecoups de politiques commerciales américaines moins favorables, tandis que l’évolution vers un monde bipolaire et fracturé risque de s’accélérer. », explique à EXPANSIÓN Michael Strobaek, Global Chief Investment Officer de la banque privée Lombard Odier, à l’occasion de sa première prise de parole depuis qu’il a pris ses fonctions, voilà un an. « Il sera donc impératif de mesurer soigneusement les risques. Il conviendra de faire preuve de vigilance et d’agilité dans les décisions tactiques d’investissement », ajoute-t-il.

    Le monde va subir les contrecoups de politiques commerciales américaines moins favorables, tandis que l’évolution vers un monde bipolaire et fracturé risque de s’accélérer

    Pour Strobaek, qui est arrivé de Credit Suisse après son sauvetage, l’an dernier, par UBS, dont il a même été membre du conseil d’administration, les Etats-Unis constituent la région favorite de l’entité suisse pour les douze prochains mois.

    Il se dit « conscient » des risques associés à une surpondération de la bourse américaine compte tenu des valorisations élevées et de leur dépendance aux valeurs technologiques. Il croit en ce marché, car la majorité des grandes entreprises technologiques ont enregistré de bons résultats au troisième trimestre. En outre, il estime que la trajectoire de croissance de l’intelligence artificielle (IA) continue de s’accentuer et montre « des signaux d’amélioration de la rentabilité des investissements et d’augmentation de la productivité. Nous nous attendons également à ce que les tentatives de monétisation de l’IA s’accélèrent au cours des années à venir. »

    Strobaek considère que le dollar peut encore augmenter « au-delà de toute consolidation à court terme ». Il admet qu’il n’a pas encore chiffré son hypothèse de taux d’intérêt final de la Fed à 4% et que le positionnement des investisseurs en dollars « est relativement modeste ».

    Lire aussi : L’« Amérique d’abord » a commencé à remodeler le monde. Les investisseurs doivent agir

    Pour Lombard, il faut garder un œil sur la géopolitique après les revalorisations observées sur de nombreux marchés cette année. Elles devraient en effet pousser les investisseurs à « poser un regard plus critique sur les facteurs de risque ». Sur le marché obligataire, il penche pour les dettes d’entreprise dans leur ensemble et pour le haut rendement en particulier. Il table sur de plus mauvais résultats pour les bons du Trésor américain et se concentre sur les « Bunds » allemands et les « gilts » britanniques.

    Strobaek réserve également une place pour l’or dans ses portefeuilles. Selon ses calculs, le métal jaune atteindra les USD 2’900 l’once dans un an (il s’affiche actuellement à USD 2’620) en raison de l’augmentation des réserves des banques centrales et des ETF.

    À l’écart du bitcoin

    Pour le bitcoin ou pour les autres cryptomonnaies, il ne laisse en revanche aucune place dans ses portefeuilles en dépit de leur impressionnant rebond et des sociétés d’investissement qui commencent à l’inclure dans leurs offres d’actifs. « Ils ne font pas partie de notre univers d’investissement et il est important de comprendre leur phénoménal niveau de volatilité. On a pu observer des pertes allant jusqu’à 80% par rapport aux précédents points hauts. Pour nous, les investisseurs doivent soigneusement mesurer leur exposition à ces actifs si volatils avant de les intégrer à leur portefeuille », affirme Strobaek.

    Nous attendons une baisse des taux d’intérêt de la part de la BCE jusqu’au niveau final de 1,25%, voire plus si la croissance économique se dégrade plus brusquement 

    Taux d’intérêt

    « Nous attendons une baisse des taux d’intérêt de la part de la BCE jusqu’au niveau final de 1,25%, voire plus si la croissance économique se dégrade plus brusquement », annonce le directeur des investissements, dont les prévisions concernant la politique monétaire européenne sont plus accommodantes que la majeure partie des sociétés d’investissement, qui tablent sur 2%. Les taux passeraient ainsi sous l’objectif d’inflation de 2% fixé par la BCE. « Compte tenu des limitations que subissent les politiques budgétaires dans la majorité des Etats, la politique monétaire dispose d’une certaine marge de manœuvre pour réagir », commente-t-il avant le prochain lancement des perspectives pour l’investissement en 2025 de la Banque.

    Lire aussi (article en anglais) : Outlook 2025

    Les politiques envisagées par Donald Trump affectent directement sa vision de la politique monétaire de la BCE et sa stratégie d’investissement en Europe, la région qui a le moins ses faveurs. Hormis un « certain potentiel de récupération de la bourse en France », Strobaek se détourne du Vieux continent en raison des « faibles perspectives de bénéfices ».

    Lombard Odier estime que l’Espagne enregistrera une croissance supérieure à celle des principaux pays européens

    Espagne

    Lombard Odier estime que l’Espagne enregistrera une croissance supérieure à celle des principaux pays européens. Cependant, nous ne tablons pas sur une expansion aussi forte que cette année. Si l’on y ajoute les baisses de taux d’intérêt, cela « fera probablement disparaître les facteurs favorables aux banques que nous avons pu voir en 2024 ».

    La banque est le secteur le plus important de l’IBEX 35, avec un poids de près de 30%, et les investisseurs tiennent à présent aussi compte de la fiscalité du secteur. « Quand ils augmentent alors que l’inflation est modérée, les impôts sur les sociétés ont souvent des effets négatifs sur le marché des actions », explique Strobaek. D’un autre côté, il indique que la marge d’intérêt va probablement fléchir en raison de la baisse des taux et des obligations. « Les banques espagnoles doivent affronter plusieurs vents contraires. Néanmoins, nombre d’entre elles ont réduit leur sensibilité aux taux après de nombreuses années de désendettement. De plus, la croissance des prêts semble être à nouveau positive, ce qui pourrait contribuer à compenser en partie la pression qu’elles subissent », ajoute-t-il.

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