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    La Suisse et les défis de la régulation de la finance durable

    La Suisse et les défis de la régulation de la finance durable
    Patrick Odier - Associé-gérant senior

    Patrick Odier

    Associé-gérant senior

    Publié le lundi 8 mars dans Le Temps Spotlight

    Face aux préoccupations croissantes concernant les défis générés par le changement climatique, le déclin de la biodiversité et les inégalités, les gouvernements du monde entier élaborent et mettent en œuvre de nouvelles réglementations pour accélérer la transition vers une économie plus soutenable.

    L’économie réelle et le secteur financier ont fait des progrès significatifs au cours de la dernière décennie en améliorant leurs pratiques commerciales et en réorientant leurs modèles d’affaires. Cependant, l’écart reste considérable entre la situation actuelle et celle où nous devrions être. Les dernières estimations de Climate Action Tracker indiquent que la planète est en voie de se réchauffer de 2.9 degrés Celsius, alors que l’Accord de Paris fixe la limite à 1.5-2.0°.

    Le secteur financier peut devenir un acteur clé de la transition, toutefois, la qualité de l’information qu’il peut intégrer et divulguer dépend largement de la qualité de l’information accessible. L'absence de langage commun dans la qualification et la quantification des activités économiques dites soutenables est un défi majeur pour traiter les cas d’éco-blanchissement et génère une confusion généralisée auprès des consommateurs et des investisseurs, mais également au sein des entreprises, de la société civile et des décideurs. En participant activement à la résolution de ces défis, la Suisse a l'occasion de promouvoir ses intérêts nationaux et internationaux.

    Le secteur financier peut devenir un acteur clé de la transition, toutefois, la qualité de l’information qu’il peut intégrer et divulguer dépend largement de la qualité de l’information accessible

    À ce jour, plusieurs législations et réglementations de soutenabilité sont en cours d’élaboration, en particulier en ce qui concerne la classification des activités économiques. À l’échelle mondiale, nous comptons aujourd’hui plus d’une dizaine de taxonomies, émanant de l’Union européenne, du Canada, du Royaume-Uni ou encore de la Chine. Afin d’offrir une base commune à ces initiatives, l’Union européenne et plusieurs autorités publiques dont celles de Pékin ont fondé l’International Platform on Sustainable Finance Common Ground Taxonomy. Cette dernière, rejointe par la Suisse, devrait devenir la référence internationale des différentes initiatives de taxonomie.

    D’une manière générale, l’Union européenne occupe une place centrale dans ces développements. Elle est aujourd’hui au-devant de la scène alors qu’elle implémente les différents volets de son ambitieux plan d’action pour la croissance durable (EU Action Plan). Son cadre réglementaire est l’un des plus complets, mais aussi l’un des plus dirigistes au monde.

    … un bon nombre de banques de la place financière se sont déjà attelées à la mise à jour des prospectus de leurs fonds de placements destinés à la clientèle européenne

    Alors que la Suisse s’interroge sur la direction à suivre à l’échelle domestique, un bon nombre de banques de la place financière se sont déjà attelées à la mise à jour des prospectus de leurs fonds de placements destinés à la clientèle européenne. Pour les fonds dits durables, la régulation de l’UE exige que les institutions financières s’engagent sur leur niveau d’ambition. Dès 2022, celles-ci devront divulguer la part éligible de leurs fonds de placements à la Taxonomie européenne. Afin d’intégrer le caractère très évolutif de ces enjeux, la Suisse serait bien inspirée d’ouvrir le dialogue avec les acteurs économiques afin de favoriser un cadre réglementaire souple fondé sur des principes, sur l’accès de la qualité de l’information et sur l’autoréglementation.

    Au niveau politique, le Conseil fédéral a apporté son soutien officiel au groupe de travail sur l’information financière relatives aux changements climatiques, le Task Force on Climate-related Financial Disclosures (TCFD), en janvier dernier. Il a pour mission d’élaborer des recommandations sur la transparence financière des entreprises en matière climatique. Ses recommandations constituent un cadre international commun, qui permet aux entreprises ainsi qu’aux acteurs du secteur financier d’évaluer et de chiffrer correctement leur exposition au risque climatique afin de mettre en place les stratégies nécessaires dans leurs activités. En d’autres termes, il s’agit pour les investisseurs d’avoir les bases factuelles afin de prendre leurs décisions d’investissement de manière fondée. Ce soutien officiel des autorités fédérales s’est suivi d’un appel aux entreprises suisses, tous secteurs économiques confondus, à mettre en œuvre les recommandations du TCFD sur une base volontaire. Tout en indiquant qu’un projet serait élaboré en vue de rendre celles-ci contraignantes à l’image du Royaume-Uni.

    … le Task Force on Climate-related Financial Disclosures (TCFD) … a pour mission d’élaborer des recommandations sur la transparence financière des entreprises en matière climatique.

    Face à l’urgence climatique, il reste enfin certains mécanismes de marché qui offrent des solutions intéressantes mais nécessitent des reformes. La COP26 qui se tiendra à Glasgow en novembre 2021 a notamment pour objectif de remédier à la problématique du prix du carbone, actuellement sous-évalué, afin que ce dernier puisse enfin être intégré à sa juste valeur dans les modèles économiques.

    Mesurer la trajectoire de décarbonisation des entreprises

    Alors que les questions de régulations font débats, ne perdons pas de vue l’objectif de fond: la planète et ses habitants ont urgemment besoin de normes qui permettent d’accélérer les investissements vers les entreprises capables de répondre aux défis environnementaux et sociaux. Sans moyen d'anticiper l'intensité carbone future des entreprises, les investisseurs naviguent aveuglément à travers ce changement structurel de l'économie. Il relève pourtant du devoir fiduciaire des intermédiaires financiers de se faire une idée aussi complète que possible de l’approche suivie en matière de durabilité, ce qui a un impact direct sur la qualité et la sécurité de l’investissement. Le reporting de l’empreinte carbone des sociétés, bien que nécessaire, reste aujourd’hui insuffisant pour identifier les trajectoires de décarbonisation des entreprises. Ce sont pourtant ces mêmes trajectoires qui déterminent notre alignement avec les objectifs de l’Accord de Paris.

    La planète et ses habitants ont urgemment besoin de normes qui permettent d’accélérer les investissements vers les entreprises capables de répondre aux défis environnementaux et sociaux.

    Les outils de mesure d’alignement de température des investissements avec l’Accord de Paris offrent une solution et pourraient devenir un standard de la TCFD. Ils ont notamment reçu l’aval de la puissante  Net Zero Asset Owner Alliance. Assurer que ce type de données prospectives soient mises à la disposition des investisseurs est d’une importance majeure afin de rediriger les capitaux privés vers des entreprises en phase avec les objectifs fixés pour limiter le réchauffement à 1.5-2.0° au-dessus des niveaux préindustriels. Le développement d’exigences de reporting de ce type de données offrirait également une opportunité pour la place financière suisse de se positionner comme un leader mondial en matière de finance durable. 

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