perspectives d’investissement
Février - La percée olympique de la Chine durant l'année du Tigre
Lombard Odier Private Bank
Les fans de sport ont été gâtés dernièrement : deux Jeux olympiques en moins d'un an. Le 4 février 2022, Pékin deviendra la première ville à avoir accueilli à la fois les Jeux d'été et les Jeux d'hiver, une source considérable de fierté nationale. On n’y verra pas les sports insolites des précédents JO, tels que la natation synchronisée en solo ou le duel au pistolet, mais on pourra assister à de nouvelles épreuves, comme le ski « big air » avec ses sensations fortes et le « snowboard cross par équipes mixte » avec ses risques de fractures osseuses. Les Jeux olympiques coïncident avec les célébrations du Nouvel An chinois, une fête nationale majeure. Face à la menace Omicron, les festivités se feront discrètes, même si dans quelques jours, le monde entier aura les yeux rivés sur la Chine et les journalistes étrangers seront sur le terrain. Certes, les millions de visiteurs habituels en seront exclus, mais les autorités chinoises auront tout de même fait le ménage.
À commencer par la pollution atmosphérique. Il y a une dizaine d'années, ce qui frappait d’abord en visitant Pékin, c’était le smog. Dans les écoles fréquentées par les milieux aisés, les enfants étudiaient dans des tentes alimentées en air filtré. Les masques faciaux y étaient à la mode bien avant la pandémie. Depuis, Pékin a réalisé d'énormes progrès en matière de lutte contre la pollution, en réduisant les émissions des centrales électriques au charbon, des aciéries et des cimenteries, et en subventionnant la conversion aux chaudières à gaz des propriétaires de biens immobiliers. La semaine dernière, les autorités de Pékin ont déclaré que la ville respectait pour la première fois les normes nationales de qualité de l'air, ayant réduit de 63 % les dangereuses particules en suspension, des chiffres conformes à ceux du programme des Nations unies pour l'environnement. L’opération « ciel bleu » en prévision des Jeux olympiques d'hiver a porté ses fruits, même si elle n'est pas dénuée d'effets secondaires, comme la flambée du prix des engrais suite aux récentes fermetures d'usines.
Accueillir les Jeux olympiques est une tâche herculéenne, dont les retombées économiques restent étonnamment modestes. Une étude publiée en 2016 dans le Journal of Economic Perspectives a révélé que « dans la plupart des cas, les Jeux olympiques sont une entreprise déficitaire pour la ville hôte. » Même les candidatures malheureuses coûtent de l'argent : Chicago a dépensé une somme estimée à 100 millions USD pour sa candidature de 2016 avant de perdre face à Rio. Les pays prennent des mesures extraordinaires pour assurer le spectacle : la taxe sur le tabac imposée par Montréal a en partie servi à financer ses jeux de 1976. Parfois, les pays hôtes se sont même retrouvés au bord d’un gouffre financier : nombre d’économistes estiment que le coût des Jeux d'Athènes en 2004 a contribué à la crise économique grecque de 2009. Des chercheurs de l'Université d'Oxford estiment qu'en moyenne, les Jeux organisés depuis 1960 ont dépassé le budget de 172 %, après correction des effets de l'inflation. En 2022, Pékin devra faire face à de nouveaux obstacles: les dépenses supplémentaires et les difficultés logistiques liés aux contrôles anti-Covid, ainsi que l’exclusion d’une majorité de spectateurs, réduiront à néant toute augmentation potentielle des recettes touristiques.
L'ampleur des efforts déployés par Pékin pour accueillir les jeux en pleine pandémie de Covid-19 est impressionnante. Un système en « circuit fermé » permettra de séparer les athlètes du public, pour éviter la mise en quarantaine des personnes vaccinées et éventuellement prévenir une flambée de contaminations dues à Omicron. Leurs aisselles seront équipées de capteurs permettant de surveiller leur température, et l’application « MY2022 » dédiée enregistrera leur état de santé quotidien. Des bulles invisibles ont été créées autour de chaque installation olympique. Alors que la plupart des événements se dérouleront dans des stations éloignées de la métropole, l'une de ces bulles se trouve dans le centre de Pékin, où un réseau de clôtures temporaires la sépare de la normalité citadine. Près de 20 000 volontaires et membres du personnel olympique vivent et travaillent déjà dans ces bulles.
Tout cela démontre que lorsque la Chine se fixe un objectif, elle met en œuvre la volonté et les ressources nécessaires pour l'atteindre. Néanmoins, si les projecteurs du monde entier sont braqués sur les Jeux olympiques de 2022, le gouvernement chinois semble plutôt se concentrer sur des considérations politiques en vue du XXe Congrès du Parti communiste chinois, prévu pour l'automne. À l'approche de cet important événement politique - où l'on s'attend à ce que le président Xi Jinping crée un précédent en briguant un troisième mandat - la stabilité et la réalisation des objectifs de croissance seront essentiels.
Ces priorités sont apparues de manière toujours plus évidente durant ces derniers mois. L'année dernière, avec la débâcle d'Evergrande, le désendettement du secteur immobilier et le durcissement de la réglementation pour les entreprises technologiques, des jeux et de l'éducation en ligne, des inquiétudes macroéconomiques ont plané sur la Chine. Les entreprises du secteur privé ont supprimé des emplois, l'activité dans la construction et les infrastructures a ralenti et la confiance des consommateurs a faibli. Face aux preuves grandissantes d’un ralentissement de la croissance, le ton a changé et s’est accompagné d'ajustements pragmatiques de la politique, plus particulièrement depuis décembre. Le 20 janvier, après plusieurs réductions récentes du taux de réserves obligatoires des banques, la banque centrale chinoise a abaissé son taux de référence. Au début du mois, Pékin a déclaré qu'elle allait accélérer l'émission d'obligations par les collectivités locales. Le Premier ministre Li Keqiang a parlé de prolonger les réductions d'impôts, d'améliorer l'industrie manufacturière, d’augmenter les dépenses de R&D et d'aider les services et les secteurs impactés par la pandémie. Grâce à une série de nouvelles mesures d'assouplissement monétaire, et surtout budgétaire, la Chine est passée d'une politique d’austérité en 2021 à une politique de relance en 2022. Une grande partie de cet assouplissement semble se concentrer sur le premier semestre de l'année. Le contraste avec la direction prise par les États-Unis est frappant. L'assouplissement de la Chine pourrait même compenser une partie des risques que le resserrement monétaire de la Fed fait peser sur la croissance mondiale.
Bien évidemment, les risques encourus par la croissance chinoise n'ont pas disparu, notamment suite à sa stratégie « zéro Covid », avec la perspective de fermetures de villes et de ports entiers pour quelques cas seulement. Jusqu'à présent, cette approche s'est avérée raisonnablement efficace. Après une première vague qui a affecté plusieurs provinces au début du mois de janvier, les transmissions au niveau local ont considérablement diminué pour ne plus concerner que de rares cas dans cinq ou six provinces. Mais les citoyens chinois ordinaires restent inquiets face au ralentissement de la croissance et au coût élevé de la vie. Le climat des affaires a souffert de la politique disciplinaire implacable de l'année dernière. Et les répercussions d’Evergrande sont loin d’être terminées. En effet, de nombreux promoteurs immobiliers vulnérables connaissent des difficultés de financement et la demande de logements s'est considérablement ralentie.
Néanmoins, nous pensons qu'il est impératif de renforcer la croissance, et les mesures de soutien devraient aider le pays à atteindre un rythme de croissance de 5 % cette année. Nous maintenons notre surpondération de certains actifs chinois. Malgré des trajectoires monétaires diamétralement opposées, les rendements des obligations gouvernementales américaines et chinoises convergent, et nous apprécions toujours la dette souveraine chinoise libellée en renminbi pour ses vertus de diversification des portefeuilles et un potentiel de rendement supplémentaire. Nous voyons également des opportunités dans les obligations des pays émergents en devises fortes et le crédit à haut rendement. Le crédit asiatique de qualité a fait preuve de résilience en 2021 et nous pensons que les spreads semblent positionnés pour offrir une valeur relative attrayante cette année comparativement aux marchés développés. Dans le sillage des problèmes d'Evergrande et de la réponse réglementaire de la Chine, les obligations asiatiques à haut rendement ont chuté de 11 % en 2021, signant leur pire performance depuis 2008 (cf graphique). Près d'un tiers des obligations chinoises à haut rendement ont fait face à un défaut de paiement, faisant reculer le poids du pays de 50 % à 10 % au sein de l'indice asiatique. Du fait qu’il reste des titres de qualité et que les obligations chinoises à haut rendement affichent des valorisations reflétant des situations de restructuration, nous pensons que le marché pourrait atteindre le creux de la vague au deuxième trimestre, soutenu par l’assouplissement significatif de la politique monétaire. Les titres hors immobilier peuvent offrir des opportunités intéressantes, et d'autres secteurs, tels que les télécommunications, la technologie, les véhicules électriques et les énergies renouvelables, pourraient peu à peu remettre en question la domination des sociétés immobilières chinoises.
À l'approche du Nouvel An chinois, qui tombe le 1er février, il est de coutume de faire le ménage dans sa maison, afin de chasser la malchance accumulée durant l'année écoulée. Les autorités entrent dans l'année du Tigre avec leur balai bien en main.
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